Le premier président de la Cour de cassation a annoncé hier qu'il rendrait le rapport que lui a demandé l'Elysée sur la question de la rétention de sûreté « avant la fin mai ».
« J'essaierai de rester dans les limites qui avaient été fixées », a déclaré Vincent Lamanda, en présentant le rapport annuel de la Cour de cassation.
Fin février, le Conseil constitutionnel avait estimé que la rétention de sûreté « ne saurait être appliquée à des personnes condamnées avant la publication de la loi » ou « pour des faits commis antérieurement » à cette publication.
Le président de la République, Nicolas Sarkozy, avait alors fait appel au premier magistrat de France.
Le président de la République, Nicolas Sarkozy, avait alors fait appel au premier magistrat de France.
Interview de Vincent Lamanda :
Vincent Lamanda est depuis le 30 mai premier président de la Cour de cassation.
Hier, il a présenté pour la première fois le rapport annuel de la Cour.
Il donne aujourd'hui aux « Echos » sa première interview en tentant de fixer ses objectifs pour la plus haute juridiction française. Décidé à rendre la Cour de cassation plus accessible, Vincent Lamanda veut poursuivre et amplifier le travail de son prédécesseur, Guy Canivet (aujourd'hui membre du Conseil constitutionnel), en matière informatique.
Il prône notamment l'utilisation des « innovations technologiques pour améliorer les relations avec le justiciable ». Ainsi, toute personne ayant un procès en cassation en cours peut désormais suivre, de manière confidentielle, l'évolution de son affaire sur le site Internet de la Cour.
Les magistrats eux-mêmes, grâce à un « bureau virtuel », peuvent travailler en temps réel sur leur dossier. En 2007, la Cour de cassation aura plus de 20.000 affaires, dans un délai moyen de seize mois pour les affaires civiles et d'un peu plus d'un an pour les affaires pénales.
L'année dernière, plusieurs décisions - mariage et adoption homosexuels, accident du foetus - ont pu faire croire que la Cour de cassation se trouvait assez en retrait sur ces questions de société.
Ces décisions ne doivent pas être interprétées comme un jugement moral des magistrats de la Cour de cassation sur la situation des familles soumises à leur jugement. Elles doivent avant tout être comprises comme l'affirmation des limites des pouvoirs du juge, qui ne peut trancher seul tous les choix fondamentaux de société. Bien sûr, la Cour de cassation est là pour combler les silences de la loi et ses imprécisions, mais elle ne peut pas se substituer au législateur quand il n'y a pas de consensus général ou que le texte existant est parfaitement clair, comme c'est le cas des dispositions sur le mariage.
Dès lors que les textes actuels ne sont pas contraires aux engagements internationaux de la France, et notamment à la Convention européenne des droits de l'homme, seule l'adoption d'une loi nouvelle pourrait faire évoluer l'état de droit.
Quelles sont vos objectifs pour la Cour de cassation ?
Les délais de jugement se sont améliorés. Une affaire est maintenant jugée en moins de seize mois en matière civile. Mais nous devons faire mieux encore tout en conservant et en renforçant la qualité des décisions. Mon souhait est d'atteindre un an au maximum de délai de jugement. On pourra difficilement faire mieux, compte tenu des particularités de la procédure et du travail approfondi qui doit être réalisé.
Quels moyens allez-vous mettre en place pour y parvenir ?
L'année 2008 devrait voir la mise en place effective d'une dématérialisation complète des procédures civiles. Les textes nécessaires devraient être publiés prochainement.
C'est une nouvelle façon de travailler que nous voulons mettre en place : chaque magistrat aura accès, en temps réel, grâce à ce qui est appelé le bureau virtuel, à l'intégralité du dossier, sans avoir besoin d'attendre que tel ou tel ait terminé son examen. De plus, à l'audience, chaque magistrat participant au délibéré aura devant lui, sur son écran informatique, les modifications faites par les différents membres de la chambre pour aboutir à la forme définitive de l'arrêt adopté immédiatement.
La qualité des décisions est également améliorée par ce bureau virtuel, puisque chaque magistrat a notamment accès sur son ordinateur à une banque de données complète, comprenant notamment tous les arrêts de la Cour et tous les rapports déjà déposés.
Et sur vos rapports avec les cours d'appel ?
Nous désirons améliorer le dialogue avec les juges du fond. C'est-à-dire faire en sorte que la Cour de cassation ne soit pas uniquement celle qui « casse », qui annule les décisions, mais qui puisse leur apporter en amont une aide. Cela passe, là encore, par l'informatique.
Nous avons mis en place Jurica, une base de données de toutes les décisions des cours d'appel de France, que celles-ci pourront consulter. Les juridictions du second degré pourront ainsi, type de contentieux par type de contentieux, connaître l'ensemble des arrêts rendus. Cela contribuera à une meilleure application uniforme de la loi sur l'ensemble du territoire national.
Nous avons aussi décidé de faire des études thématiques, à la demande des cours d'appel, à partir de ces données. A titre expérimental, une analyse est en cours sur la réparation du préjudice esthétique.
RAPPEL:
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