lundi 3 mars 2008

La Justice invalide le site internet note2be.com

PARIS (Reuters) - Le tribunal de Paris a rendu inopérant le site internet note2be.com, qui permet aux élèves d'attribuer des notes à leurs enseignants, en lui ordonnant de retirer toute donnée nominative.

Saisi en référé, le président du tribunal, Emmanuel Binoche, a stipulé que le site paierait 1.000 euros par infraction et jour de retard, à compter de la notification de la décision.

Le juge a donné raison aux syndicats d'enseignants Snes, FSU, Snep, ainsi qu'à une trentaine d'enseignants. Le site internet devra leur verser à chacun un euro symbolique de dommages et intérêts, et leur rembourser les frais de justice.

Le magistrat a estimé que, même si les élèves bénéficiaient de la liberté d'expression, il n'était pas possible d'autoriser l'usage d'identités de professeurs dans "un dispositif présentant, faute de précautions suffisantes, un risque de déséquilibre au détriment de la nécessaire prise en compte du point de vue des enseignants".

Stéphane Cola, cofondateur du site note2be.com créé au début de l'année, a fait part de son mécontentement.

"C'est une décision étonnante, surprenante, voire inquiétante pour le développement du web", a-t-il dit à la presse. "La notation et l'évaluation des professionnels sur le web c'est un principe fondamental, un principe de développement, un principe moteur du web partout dans le monde".

Un avis que ne partage pas Francis Berguin, secrétaire général du Snes.

"Nous sommes parfaitement satisfaits de cette décision puisque ce que nous demandions au juge des référés ce n'était pas la suspension du site, c'était le retrait de toute mention nominative", a-t-il déclaré sur LCI, rappelant qu'à ses yeux, "il n'appartient pas aux élèves de noter leurs professeurs, au surplus par le truchement d'une officine commerciale".

Le ministre de l'Education nationale, Xavier Darcos, a lui aussi exprimé sa satisfaction.

Dans un communiqué, il "réaffirme son soutien total aux enseignants dont la mission difficile ne saurait faire l'objet d'atteintes anonymes sur internet".

Le site permettait de rechercher un professeur par ses nom et prénom, de lui attribuer une note en fonction de six critères ("intéressant, clair, disponible, équitable, respecté, motivé") ou de connaître la note qui lui avait été attribuée.

Un forum de discussion est lié à ce site avec des dialogues parfois violents concernant certains professeurs, relevés par les syndicats d'enseignants et versés au dossier des plaintes.

Un encadré comportait un "top 10" des enseignants les mieux notés. Les plaignants estimaient que l'utilisation des identités complètes des enseignants revenaient à constituer un fichier informatique illégal au regard de la loi.

Le fichier en question semble avoir été constitué au préalable, remarquaient-ils, car certains noms d'enseignants figuraient sur le site sans être notés.

Par ailleurs, l'évaluation des enseignants est du ressort de l'administration de l'Education nationale, ont-ils fait valoir.

Les dirigeants du site internet ont déclaré à l'audience la semaine dernière que son fonctionnement répondait aux obligations légales et que le site avait été déclaré à la Commission nationale informatique et libertés le 29 janvier.

Selon eux, les activités professionnelles ne relèvent pas de la vie privée, notamment pour des fonctionnaires chargés d'une mission de service public.

Les enseignants visés pouvaient accéder au site et corriger les informations, assuraient-ils.

Aucun texte n'interdit aux élèves de faire valoir leur opinion, qui relève de la liberté d'expression, soutenaient-ils. Ils peuvent faire appel de la décision.

Thierry Lévêque

Source : Reuters






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