samedi 29 mars 2008

Le Dalaï-Lama dénonce un "génocide culturel"

Par Clifford Coonan à Xiahe, Province du Gansu
The Independent lundi 17 mars 2008





Hier soir, la Chine luttait contre la menace la plus puissante à sa réputation internationale depuis le massacre de militants en 1989 sur la Place Tienanmen, alors que des manifestations de colère contre sa domination sur le Tibet se sont étendues aux provinces voisines.

Le chef spirituel du Tibet en exil, le Dalaï-Lama, a accusé la Chine de "génocide culturel", après les mesures sévères prises contre les moines bouddhistes et les citoyens tibétains dans la capitale de Lhassa et autres centres tibétains, qui ont fait au moins 100 morts.

A cinq mois des Jeux Olympiques, le gouvernement communiste défend ses actions en accusant le Dalaï-Lama d'insurrection organisée et en insistant sur le fait que ses forces de sécurité ont agi avec mesure contre les foules en colère.

A Lhassa, on a dit que les rues étaient largement désertées alors que les habitants faisaient le point sur une semaine tumultueuse, qui a commencé par des manifestations pacifiques de moines bouddhistes tibétains et c'est terminé avec des émeutiers en colère se confrontant à une police armée. Au monastère de Labrang, dans la province voisine de Gansu, les moines ont dit qu'ils avaient vu quatre personnes être abattues après l'attaque des manifestants par la police anti-émeutes.

Il est impossible de le vérifier parce que, à la suite d'une brève fenêtre lorsque ce correspondant et d'autres réussirent à entrer dans la ville ce week-end, les autorités ont fermé hermétiquement la ville. Mais les affrontements de Labrang, une ville pittoresque au bord du plateau tibétain, montre juste à quel point les manifestations se sont étendues.

Dans une tentative supplémentaire d'isoler les troubles, la Chine, hier soir, a mis fin à tous les permis de voyager pour les étrangers qui visitent le Tibet.

Le Comité International Olympique a jusqu'à présent ignoré les appels à un boycott des Jeux. La communauté internationale observe avec intérêt pour voir ce qui va arriver après. Fait révélateur, le Dalaï-Lama a déclaré qu'il soutient toujours l'effort de Pékin d'organiser les Jeux Olympiques. "Que ce soit intentionnel ou non, une sorte de génocide culturel est en cours", a déclaré le Dalaï-Lama, se référant à la politique de la Chine d'encourager la majorité ethnique Han à migrer vers cette région. "C'est vraiment désespéré", a-t-il dit à la BBC. "Au fur et à mesure que le camp tibétain est déterminé, les choses se tendent et le camp chinois est également déterminé. Cela signifie donc le massacre comme conséquence".

Le Dalaï-Lama, qui s'est enfui du Tibet en 1959 après un soulèvement raté, neuf ans après que l'Armée Populaire de Libération est entrée à Lhassa, est considéré par le gouvernement chinois comme un séparatiste dangereux.

Décrivant les manifestants comme des "vandales", l'agence de presse chinoise officielle, Xinhua, a fait courir des histoires d'héroïsme de la part de la police et de la milice armée face au "sabotage... organisé, prémédité et orchestré par la bande du Dalaï-Lama". Xinhua a rapporté que la violence de vendredi a fait 12 blessés graves, dont deux dans un état critique, parmi les policiers et les militaires de la police armée au cours des émeutes.

Xiahe se trouve dans la zone d'Amdo à majorité tibétaine, dont une partie se trouve dans la province chinoise de Gansu. La Région Autonome du Tibet ne se rapporte qu'à une partie du Tibet, mais près de trois millions de Tibétains vivent dans les provinces voisines de la Chine, comme Gansu et Sichuan.

Pour les Tibétains, les frontières imposées par Pékin sont sans fondement et il y a eu des protestations dans toute cette région. Selon la Campagne pour un Tibet Libre, les émeutes se sont étendues aussi au monastère de Kirti dans le Comté d'Aba, dans la province de Sichuan, où des témoins ont vu 13 personnes être abattues par les forces de sécurité.


Les protestataires utilisent un réseau de dissidence


Des Tibétains au cours d'une manifestation silencieuse,
le 17 mars, au Palais du Dalaï-Lama à Dharamsala (Inde)


Pendant l'accalmie des affrontements violents de Xiahe, dans la province de Gansu, les moines et les pèlerins en costume tibétain ont marché dans la rue en se servant des armes les plus dangereuses du monde - les appareils photos de leur téléphones mobiles. Vous pouvez causer beaucoup de dommages avec une photo qui a du grain montrant la brutalité policière depuis votre téléphone bon marché.

Beaucoup de jeunes moines qui se sont affrontés avec la police chinoise anti-émeutes, près du monastère de Labrang, n'étaient pas nés la dernière fois que les Tibétains se sont battus contre Pékin, à la fin des années 80. A cette époque, le gouvernement chinois avait rapidement rétabli l'ordre et imposé la loi martiale. La nouvelle génération dispose d'internet, l'arme de dissidence la plus puissante de la planète.

Lorsque les manifestions actuelles ont commencé à Lhassa, on a craint que la Chine coupe les liens téléphoniques mobiles. Mais les compte-rendus des témoins oculaires et les photographies de basse résolution ont cheminé dans le monde extérieur via l'excellent réseau de téléphonie mobile de la Chine.

La Grand Firewall [ou "Grande Muraille Coupe-feu"] de la Chine est un instrument contondant, mais la plupart des jeunes-gens calés en internet savent comment le contourner.

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]



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